Le président rwandais Paul Kagame.et président en exercice de l'UA est l'initiateur des projets de reformes institutionnelles

En 2016, l’Union africaine avait chargé le président rwandais de réfléchir notamment aux moyens de garantir l’autonomie financière de l’organisation. Les chefs d’État africains se rassemblent à Addis-Abeba, en Éthiopie, pour un sommet extraordinaire de l’Union africaine (UA), samedi 17 et dimanche 18 novembre, où ils chercheront à s’accorder sur un projet de réforme institutionnelle de l’organisation porté depuis deux ans par Paul Kagame.

Il reste peu de temps au président rwandais, qui a insisté pour que ce sommet soit convoqué, pour faire passer ces réformes destinées à rendre l’UA moins bureaucratique et plus efficace, mettent en garde les analystes. En janvier, il cédera son poste annuel de président en exercice de l’UA au chef de l’État égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, bien moins enclin que lui à défendre ces réformes.

 « L’inquiétude tient à ce que, même si elle ne devrait pas chercher pas à revenir dessus, l’Égypte ne ferait très probablement pas la promotion de ces réformes », explique Elissa Jobson, du centre d’analyse International Crisis Group (ICG). Pour elle, le sommet de ce week-end est le « dernier effort » pour faire adopter autant de modifications que possible avant que M. Kagame ne passe la main à M. Al-Sissi.

Tailler dans les dépenses

Longtemps critiquée pour sa lourdeur administrative et son inefficacité, l’UA avait chargé en 2016 le leader rwandais de réfléchir à une réforme visant notamment à garantir l’autonomie financière de l’organisation pour lui donner les moyens de sa souveraineté politique. M. Kagame a cherché à tailler dans les dépenses de l’UA en limitant le nombre de sommets et de commissions et à réduire sa dépendance à l’égard des donateurs étrangers. Il a aussi suggéré qu’elle circonscrive ses priorités à la sécurité, la politique et l’intégration économique.

Mais plus de deux ans et cinq sommets après, plusieurs États clés sont toujours extrêmement réticents et l’espoir de voir un accord global être conclu cette semaine dépend surtout de qui se rendra à Addis-Abeba. « Il faudra voir combien de chefs d’État viennent et ça déterminera le succès du sommet et, d’une manière ou d’une autre, le succès des réformes », remarque Liesl Louw-Vaudran, consultante auprès du centre sud-africain d’analyse Institute of Security Studies (ISS).

Pour l’instant, l’Afrique du Sud, le Zimbabwe, le Botswana, les Comores, le Togo et le Ghana ont confirmé qu’ils enverraient leurs présidents. Le Nigeria et le Mozambique délégueront leurs ministres des affaires étrangères. Les autres pays n’ont pas fait savoir qui se déplacerait.

Réticence des plus puissants

Certaines réformes ont déjà été adoptées. En début d’année, les chefs d’État de l’UA avaient accepté de faire passer de deux à un le nombre de sommets annuels. Selon Mme Jobson, près de la moitié des 55 États membres ont accepté de payer une taxe de 0,2 % sur les importations pour réduire la dépendance de l’UA à l’égard des bailleurs de fonds étrangers, lesquels contribuent à son budget à hauteur de 50 % ; et l’autre moitié trouvera un autre moyen de payer.

Aucune décision n’a encore été prise sur les autres propositions de M. Kagame, comme celle de charger le président de la Commission de l’UA, actuellement le Tchadien Moussa Faki Mahamat, de nommer le vice-président de la Commission et les autres commissaires. La plupart des pays africains les plus puissants sont en effet réticents à donner à l’UA la capacité de prendre des décisions à leur place, observe Mme Louw-Vaudran. « Ils ne veulent abandonner aucune part de souveraineté à la Commission de l’UA. Ils la voient encore comme une sorte de secrétariat chargé de mettre en œuvre ce que les chefs d’État décident », explique-t-elle. Mme Jobson souligne que les réserves de l’Egypte tiennent à une sorte de ressentiment, le pays ayant été suspendu de l’UA un an après le coup d’État de 2013 ayant amené M. Al-Sissi au pouvoir. « Il y a un sentiment général que cette décision avait été davantage impulsée par la Commission que par les États membres. C’est une raison supplémentaire pour l’Égypte de vouloir voir les pouvoirs de la Commission réduits », pense-t-elle. Un diplomate travaillant à l’UA et ayant requis l’anonymat ajoute que l’Égypte a publiquement soutenu les réformes mais aimerait probablement qu’elles se concentrent sur d’autres aspects que ceux défendus par M. Kagame, comme la sécurité et la reconstruction post-conflits. « Personne n’espère vraiment que ce sommet va permettre de résoudre quoi que ce soit, mais vous verrez peut-être quelques décisions prises », laisse-t-il entendre.

Source : AFP

 

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