Mme Safietou Lopez / Zongo Présidente d’honneur du Cadre de concertation nationale des organisations de la société civile (CCNOS), lors d'un meeting.

Placée en détention provisoire depuis le 29 août, l’activiste burkinabè Safiatou Lopez, poursuivie par la justice militaire pour « complot », a été interrogée mardi 11 septembre par le juge d’instruction.

Arrêtée le 29 août dernier dans le cadre d’une enquête judiciaire sur son implication présumée dans une tentative déstabilisation du pouvoir du président Roch Marc Christian Kaboré, la militante Safiatou Lopez est soupçonnée d’avoir participé à la préparation d’une opération en vue de libérer les auteurs présumés du putsch de 2015 détenus à la Maison d’arrêt et de correction des armées. La militante est arrivée au tribunal militaire de Ouagadougou en compagnie de son avocat, Me Silvère Kiemtaremboumbou. Et à en croire ce dernier, face au juge d’instruction Kader Martial Ouattara, en charge du dossier, elle s’est montrée sereine.

Trois personnes inculpées

« Ma cliente était à  l’aise pour répondre sur le fond du dossier. Après la notification des charges, elle s’est sentie vraiment soulagée, d’autant plus qu’aucun inculpé ne l’a citée nommément comme complice », a affirmé à Jeune Afrique l’avocat de la présidente du Cadre de Concertation des organisations de la société civile.

Deux personnes, un civil du nom de Mamadou Drabo et un militaire Abdou Sanou sont également dans le collimateur de la justice militaire burkinabè dans le cadre de la même affaire. Ingénieur dans le BTP, Mamadou Drabo est suspecté d’être le recruteur des militaires de l’ex Régiment de sécurité présidentielle (RSP) qui devait monter une opération visant la Maison d’arrêt et de correction des armées.

Tous les trois sont inculpés pour « complot » et « incitation à la commission d’actes contraires au devoir et à la discipline militaire », a précisé l’avocat. « Des infractions similaires à celles reprochées au colonel Auguste Denise Barry », souligne l’avocat, évoquant les poursuites contre l’ancien ministre de la Sécurité de la Transition, remis en liberté provisoire le mardi 28 août après huit mois de détention. Me Silvère Kiemtaremboumbou parle même d’une « coïncidence troublante », et s’interroge sur un éventuel lien entre les deux dossiers.

Ancienne alliée du MPP

Figure de proue de la société civile burkinabè, Safiatou Lopez s’est illustrée durant les jours de colère d’octobre 2014 qui ont précipité la chute du régime de Blaise Compaoré, ainsi que lors la résistance populaire contre la tentative de coup d’État perpétré par le général Gilbert Diendéré et l’ex-RSP en 2015, des événements au cours desquels son domicile avait été incendié par des putschistes.

Cheville ouvrière de l’ascension du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP, au pouvoir) durant la présidentielle de 2015, Safiatou Lopez s‘est rapidement désolidarisée du gouvernement, dénonçant la gestion du président Kaboré.

Pour Marcel Tankoano, président du M21 et membre d’un collectif de la société civile réclamant sa libération, « le pouvoir actuel paie Safiatou Lopez en monnaie de singe après qu’elle ait risqué sa vue pour le MPP ». Il qualifie la procédure de « règlement de compte » et d’« acharnement contre des camarades. En conséquence, nous exigeons sa libération. »

Étranges écoutes

Alors que Safiatou Lopez a été entendue sur le fond du dossier, des enregistrements présentés comme des conversations téléphoniques entre l’activiste et Mamadou Drabo circulent sur la toile  burkinabè, notamment sur whatsapp. Les deux interlocuteurs évoquent un projet qui vise à causer des dégâts à Koulouba, au centre de Ouagadougou. « Nous allons le faire, je vais me coaguler et passer à l’action, tu seras édifiée après mon passage à l’acte », dit un homme présenté comme étant Drabo, qui ajoute : « Regardez les risques que vous avez pris sur le terrain. Ce n’est pas lui et Zida qui ont pris l’initiative de dissoudre le RSP ? »

« C’est de l’intox », dénonce Mathias Tankoano, qui juge que « cette conservation a été diffusée sur la toile pour impliquer Safiatou Lopez dans l’affaire Barry ». La fameuse écoute, en tout cas, ne figure pas au dossier dans lequel Lopez est mise en cause.

« J’ai pu voir lesdits enregistrements circuler sur les réseaux sociaux. Le dossier que j’ai consulté ne comporte aucun enregistrement. Si c’est une pièce du dossier, comment se fait-il qu’elle se retrouve sur les réseaux sociaux ? Ma cliente est à l’aise par rapport à ces enregistrements, qui n’ont aucun lien avec les charges retenues contre elle », s’emporte Me Kiemtaremboumbou.

Source : JA

 

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